Outils de biologie moléculaire pour l'identification des bactéries lactiques du raisin et du vin

État: En vigueur

Outils de biologie moléculaire pour l'identification des bactéries lactiques du raisin et du vin

RÉSOLUTION OIV-OENO 409-2012

OUTILS DE BIOLOGIE MOLÉCULAIRE POUR L'IDENTIFICATION DES BACTÉRIES LACTIQUES DU RAISIN ET DU VIN

L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Vu l'article 2 paragraphe 2 iv de l'accord du 3 avril 2001 portant création de l'Organisation internationale de la vigne et du vin,

SUR PROPOSITION du groupe d’experts « Microbiologie »

DECIDE d’adopter  les outils de biologie moléculaire suivants pour l’identification des bactéries lactiques du raisin et du vin

OUTILS DE BIOLOGIE MOLÉCULAIRE POUR L'IDENTIFICATION DES BACTÉRIES LACTIQUES DU RAISIN ET DU VIN.

Généralités : Au cours des dernières décennies, différentes méthodes d'identification moléculaire des bactéries lactiques (BL) d'intérêt œnologique ont été élaborées afin de réduire le temps d'analyse généralement nécessaire aux tests phénotypiques. En outre, parce qu'elles ne sont pas influencées par des facteurs physiologiques et environnementaux, les méthodes moléculaires offrent des résultats d'identification plus fiables.

Elles peuvent être utilisées pour l'identification de bactéries lactiques dans le moût de raisin et à différentes étapes de la vinification, du vieillissement et du stockage. Parmi ces outils figurent des méthodes dépendantes et des méthodes indépendantes de la culture. Les méthodes moléculaires permettent une identification au niveau de l'espèce et de la souche. De plus, les souches de bactéries peuvent être différenciées entre elles et, en outre, les souches porteuses de gènes spécifiques peuvent être détectées quelle que soit l'espèce. Le tableau fait la synthèse des principales applications des méthodes d'identification moléculaire des bactéries lactiques du raisin et du vin.

 

Identification au niveau de l'espèce

Identification au niveau de la souche

Fonction spécifique

Méthodes dépendantes de la culture (isolement préalable de bactéries sur plaques et culture)

Hybridation (1) : dot-blot, sur colonies,

Hybridation (2) : en dot-blot, sur colonies, in situ (“FISH”) et microscopie en fluorescence

Méthodes basées sur la PCR :

  • amplification d’une région consensus et séquençage (3)
  • PCR spécifique à l'espèce (4)
  • (RLFP) ou ARDRA : amplification et restriction (6)

Méthodes basées sur la PCR :

  • RAPD : amplification aléatoire

Méthodes basées sur la PCR : PCR spécifique (5)

PFGE : fragmentation de l'ADN génomique par enzymes de restriction à sites rares et électrophorèse en champ pulsé sur gel

Méthodes indépendantes de la culture

(analyse directe de l'échantillon)

1 Recherche d'une espèce ou d'une fonction donnée

hybridation in situ et microscopie de fluorescence (FISH) (1)

PCR (4)

Hybridation (2) in situ (“FISH”)

PCR (5)

2 Identification de bactéries sans a priori

PCR-DGGE et séquençage (6)

(1) Sonde spécifique à l'espèce

(2)  La sonde est un gène, un fragment de gène ou une région codant une protéine spécifique (enzyme)

(3) Les amorces amplifient une région consensus (ADNr 16S, rpoB)

(4) Les amorces sont spécifiques aux espèces

(5) Les amorces sont spécifiques à un gène ou une région codant une protéine spécifique (enzyme)

(6) Les amplicons consensus sont séparés par électrophorèse en gel dénaturant, puis séquencés. La séquence est propre à chaque espèce.

METHODES DEPENDANTES DE LA CULTURE

1.      Introduction

Les méthodes d’analyse sont appliquées sur  des cultures pures, ou des colonies dont l’ADN est extrait ou rendu accessible à des sondes.

1.1.      Isolement de clones et obtention de cultures pures

La plupart des bactéries qui se développent dans le vin peuvent être isolées à l'aide de techniques microbiologiques classiques, telles que la culture sur milieu nutritif gélosé convenable. Selon leur concentration, une dilution en série de l'échantillon dans de l'eau physiologique stérile (à 0,9% de NaCl) est nécessaire avant la culture sur milieu nutritif gélosé spécifique. Les bactéries lactiques du raisin et du vin sont mises en culture dans le milieu décrit pour le dénombrement (CII/MICRO/01/206). La population bactérienne obtenue peut ensuite être identifiée.

Les clones sont isolés sur la plaque et remis en culture dans le même milieu liquide, ou à nouveau sur plaque afin de purifier la souche isolée. Un seul clone est ensuite réintroduit dans le milieu de culture liquide afin de produire la biomasse de culture pure qui sera analysée. Dans certains cas, la colonie est directement utilisée pour l'identification, par exemple pour la technique PCR (réaction de polymérisation en chaine). C’est la totalité des colonies à la surface de la boîte qui est analysée dans l'hybridation sur colonie.

1.2.      Extraction d'ADN

L'ADN doit être extrait de la biomasse récoltée après culture. Il est rendu accessible par lyse des cellules in situ pour hybridation sur colonies ou pour analyse microscopique (“FISH”). La méthode PCR directe sur colonies ne nécessite pas d'étape d'extraction : l'ADN devient disponible pour l'amplification lors du premier cycle de montée en température du protocole d'amplification.

2.      Au niveau de l'espèce ou pour une fonction spécifique

2.1.      Hybridation [« en tache » (dot-blot) ou colonies] avec sondes d’ADN spécifiques d’une espèce ou d’une région du génome

Champ d'application :

Identification des bactéries lactiques du vin au niveau de l'espèce ou d’une fonction spécifique (activité enzymatique).

Principe :

Le principe commun des méthodes reposant sur l'hybridation ADN-ADN est que des fragments d’acides nucléiques complémentaires peuvent s'hybrider dans des conditions spécifiques, dépendant principalement de la température et de la force ionique du tampon. Après dénaturation en simple-brin, l'ADN extrait des bactéries à identifier, appelé “ADN cible”, peut se réassocier dans des conditions d'hybridation avec un simple-brin connu d'ADN, appelé “la sonde”, si les séquences sont identiques ou suffisamment proches. Le choix de la sonde est par conséquent une décision essentielle, et c’est elle qui détermine le niveau taxonomique de l'étude. La sonde peut être tout ou partie du génome donnant la spécificité. Le plus souvent, on utilise des sondes de l'ADNr 16S pour identifier l'espèce. Mais parfois, une “hybridation croisée” se produit et il convient de trouver d'autres séquences. Le même principe s'applique à l'identification de bactéries porteuses de gènes spécifiques, ou de régions impliquées dans une fonction donnée. Les sondes sont les gènes, ou parties de gènes, codant pour les protéines correspondantes.  L'application la mieux connue est l'identification des bactéries d'altération.

En fonction de l'application, il existe plusieurs procédures d'hybridation.

(i) méthodes utilisant l'ADN extrait d'une culture de la souche à identifier.

L'ADN cible extrait de la culture à identifier est déposé et fixé sur une membrane. La sonde d’ADN, composée d'un ADN de référence marqué, est mise en contact avec la membrane qui est placée dans les conditions de température d'hybridation. Après la réaction d’hybridation et les lavages destinés à éliminer les restes de sonde non hybridée, la membrane est traitée pour révéler les hybrides (ADN cible/ADN sonde)

(ii) méthodes appliquées sur les cellules entières : sur colonies.

La membrane est d'abord étalée à la surface de la gélose nutritive sur les colonies qui se sont développées, puis elle est retirée. Elle retient les colonies qui ont été transférées par simple contact. Puis la membrane est traitée pour la lyse des cellules (afin que l’ADN soit accessible) et l'hybridation avec la sonde. Après hybridation, une image de la plaque est alors obtenue sur laquelle les colonies visibles appartiennent à la même espèce que la sonde de référence. Grâce à l'utilisation de plusieurs sondes ADN spécifiques, cette technique permet d'identifier les espèces de bactéries lactiques de l’échantillon après hybridations/déshybridations successives de la même membrane.

Références :

  1. Lonvaud-Funel, A., Fremaux, C., Biteau, N., Joyeux A. (1991a). Speciation of lactic acid bacteria from wines by hybridisation with DNA probes. Food Microbiol., 8, 215-222.
  2. Lonvaud-Funel, A., Joyeux, A., Ledoux, O. (1991b). Specific enumeration of lactic acid bacteria in fermenting grape must and wine by hybridization with non isotopic DNA probes. J. Appl. Bacteriol., 71, 501–508.
  3. Sohier, D., Coulon, J., Lonvaud-Funel, A. (1999). Molecular identification of Lactobacillus hilgardii and genetic relatedness with Lactobacillus brevis. Int. J. Syst. Bacteriol., 49, 1075-1081.

(iii) polymorphisme de restriction (RFLP) ribotypage :

Les fragments de restriction obtenus après digestion de l'ADN total extrait de la culture sont séparés par électrophorèse sur gels d'agarose et transférés sur des membranes en nylon ou en nitrocellulose pour hybridation avec une sonde d'ADN ribosomique (Southern). La sonde est préalablement marquée.

Après hybridation et révélation, le profil est l'image des fragments générés par restriction sur toute la longueur de la région génomique complémentaire à la sonde.

L'utilisation de gènes ribosomiques pour la sonde (ou éventuellement d'autres gènes) permet d'identifier la souche d'une espèce ou d'une sous-espèce en comparant la taille des fragments de la région ribosomale (ribotypage) (ou éventuellement d'une autre région spécifique du génome).

2.2.      Méthodes basées sur la PCR (réaction de polymérisation en chaine):

Champ d'application :

Identification au niveau de l'espèce de bactéries lactiques préalablement isolées de moûts et vins par culture sur plaque. La méthode PCR peut être adaptée à plusieurs niveaux d'identification (genre, espèce ou souche) en fonction du choix des amorces (courte séquence oligonucléotidique). Le principe est le suivant : l'amorce recherche la région complémentaire pour s’apparier sur la matrice d'ADN qui est analysée. C’est à partir de l’extrémité de l’amorce que la polymérisation s’opère en recopiant le brin d’ADN matrice un très grand nombre de fois ce qui conduit à l’amplifiat

2.2.1.     Amplification de régions consensus et séquençage : sous-unité de l’ARN ribosomique 16S, et rpoB

Principe :

Le séquençage de l’amplifiat du gène codant pour l’ARNr 16S constitue la méthode de base. Cette approche s'appuie sur la présence obligatoire de l’ARNr dans les bactéries. La séquence nucléotidique de ce gène permet la classification phylogénétique et l'identification d'isolats inconnus, car la base de données existante pour ce gène est la plus étendue des gènes bactériens. La séquence nucléotidique de la région entre les gènes codant pour les ARNr 16S et 23S, appelée ITS, peut être utilisée pour l'identification, mais sa séquence est moins conservée. Dans ce cas, la PCR utilise des amorces correspondant aux régions conservées universelles dans les gènes codant l’ARNr 16S et 23S, de part et d’autre de l’ITS.

La séquence rpoB qui code une sous-unité de l'ARN polymérase est également intéressante. Il a été montré qu'elle convient davantage à l'identification (du moins en l'état actuel des connaissances). En effet, il n'y a qu'une seule copie de ce gène dans les bactéries, alors qu’il y a plusieurs copies de l'opéron ribosomique dont la séquence peut varier au sein de la même espèce. Cependant son utilisation est plus rare car la base de données est relativement moins documentée. Une base de données a été réalisée pour les principales bactéries lactiques du vin. Des amorces ont été élaborées pour les bactéries lactiques du vin.

Protocole général :

Cette méthode nécessite l'extraction de l'ADN de la culture pure à identifier. L’ADN extrait sert de matrice dans la réaction de PCR. Après séparation par électrophorèse, les amplifiats sont purifiés avec les kits appropriés, puis ils sont séquencés. Les séquences obtenues des gènes codant l’ARNr 16S ou rpoB sont comparées à celles figurant dans les bases de données disponibles

Références :

  1. Du Plessis, E.M.; Dicks L.M.T., Pretorius I.S., Lambrechts M.G., & du Toit M. (2004). Identification of lactic acid bacteria isolated from South African brandy base wines. Int. J. Food Microbiol. 91: 19-29
  2. Sato, H., Yanagida, F., Shinohara, T., Suzuki, M., Suzuki, K., Yokotsuka, K. (2001). Intraspecific diversity Oenococcus oeni. FEMS Microbiol. Lett. 202, 109-114
  3. Renouf, V., O. Claisse, and A. Lonvaud-Funel. 2006. rpoB gene: A target for identification of LAB cocci by PCR-DGGEand melting curves analyses in real time PCR. J.  Microbiol. Met. 67:162-170.

2.2.2.     PCR spécifique à l'espèce

La technique PCR est adaptée à l'identification directe des espèces, parce qu’on peut trouver des amorces spécifiques qui n’amplifient que chez une espèce donnée. Diverses paires d'amorces ont été décrites pour l'identification de plusieurs espèces de bactéries lactiques. En œnologie, l'espèce la plus importante à identifier est Oenococcus oeni. Les amorces reposent sur des régions de l'enzyme malolactique qui diffèrent selon l'espèce.

Références :

  1. Zapparoli G, Torriani S, Pesente P, Dellaglio F., 1998.Design and evaluation of malolactic enzyme gene targeted primers for rapid identification and detection of Oenococcus oeni in wine. Lett Appl Microbiol. 27:243-246

2.2.3.     Polymorphisme de taille des fragments de restriction (PTFR) (RFLP)

Champ d'application :

Identification d'espèces de bactéries lactiques issues du vin

Principe :

Selon le même principe que le ribotypage (voir paragraphe iii), l'amplification PCR de la région ribosomale (ou autre région), suivie de la restriction de l’amplifiat par des enzymes appropriées fournit les mêmes informations. Mais cette méthode est beaucoup plus simple et rapide que celle de la restriction suivie de l'hybridation.

La restriction du gène codant l’ARNr 16S ou du gène codant RpoB avec une endonucléase de restriction appropriée, et la séparation des fragments par électrophorèse sur gels d'agarose produisent un profil caractéristique des fragments d'ADN spécifique à une espèce particulière.

Résultats :

Discrimination des souches O. oeni par rapport aux autres espèces par analyse PTFR d'ARNr 16S.

Identification des espèces de bactéries lactiques par PTFR du gène rpoB.

Références :

  1. Claisse, O., V. Renouf, and A. Lonvaud-Funel. 2007. Differentiation of wine lactic acid bacteria species based on RFLP analysis of a partial sequence of rpoB gene. Journal of microbiological methods 69:387-390.
  1. Zavaleta, A.I.; Martínez-Murcía, A.J.; Rodríguez-Valera, F. 16S-23S rDNA intergenic sequences indicate that Leuconostoc oenos is phylognetically homogeneous. Microbiology, 1996, 142, 2105-2114.
  2. Sato, H.; Yanagida, F.; Shinohara, T.; Yokosutka, K. Restriction fragment length polymorphism analysis of 16S rRNA genes in lactic acid bacteria isolated from red wines. J. Biosc. Bioengin. 2000, 3, 335-337.

3.      Identification au niveau de la souche

Champ d'application : Identification des bactéries lactiques du vin au niveau de la souche.

3.1.      Méthodes basées sur la PCR : Amplification aléatoire de l'ADN (RAPD)

Principe :

La RAPD repose sur la PCR avec des amorces de séquences arbitraires capables de s’hybrider en divers points du génome. Une seule amorce oligonucléotidique arbitraire d'une longueur d'environ 10 nucléotides est utilisée pour l'amplification de segments aléatoires d'ADN génomique et génère un profil caractéristique composé d'ADN courts de différentes longueurs. Il est également possible de combiner deux oligonucléotides ou davantage (RAPD multiplex) dans une seule PCR afin de produire des profils RADP plus fiables pour le typage des souches. Les profils RAPD sont caractéristiques des souches, leur fiabilité et leur pouvoir de discrimination dépendent des séquences des amorces.

Résultats :

Cette méthode permet d’obtenir une empreinte génétique caractéristique de la souche. Elle pet être utilisée pour contrôler la bonne implantation de ferments malolactiques pendant la vinification. L’inconvénient majeur vient du manque de répétabilité et de  reproductibilité.

Références :

  1. Bartowsky, E.J., McCarthy, J.M., Henscheke, P.A. (2003). Differentiation of Australian wine isolates of Oenococcus oeni using random amplified polymorphic DNA (RAPD). Aus. J. of Grape and Wine Res., 9, 122-126
  2. Du Plessis, E.M., Dicks, L.M.T. (1995). Evaluation of random amplified polymorphic DNA (RAPD)-PCR as a method to differentiate Lactobacillus acidophilus, Lactobacillus crispatus, Lactobacillus amylovorans, Lactobacillus gallinarum, Lactobacillus gasseri, and Lactobacillus johnsonii. Curr. Microbiol., 31, 114-118.
  3. Reguant, C., Bordons, A. (2003). Typification of Oenococcus oeni strains by multiplex RAPD-PCR and study of population dynamics during malolactic fermentation. J. Appl. Microbiol., 95, 344-353.
  1. Rodas, A.M., Ferrer, S., Pardo, I. (2005). Polyphasic study of wine Lactobacillus strains: taxonomic implications. Int. J. Sys. Evol. Microbiol., 55, 197-207.
  2. Zavaleta, A.I., Martinez-Murcia, A.J., Rodriguez-Valera, F. (1997). Intraspecific genetic diversity of Oenococcus oeni as derived from DNA fingerprinting and sequence analyses. Appl. Environ. Microbiol., 63(4), 1261-1267.

3.2.      Analyse du profil de restriction du génome par électrophorèse en champ pulsé (PFGE)

Principe :

Une digestion de l'ADN génomique est effectuée avec des enzymes de restriction à sites rares de coupure. La totalité du génome est fragmenté en un nombre de fragments permettant une lecture facile et une différentiation claire entre les souches. Des cellules bactériennes de cultures fraîches sont recueillies par centrifugation et immobilisées dans des blocs d'agarose. La lyse de la cellule et la restriction de l’ADN génomique sont réalisées dans les blocs afin que l'ADN soit uniquement fragmenté de façon spécifique par l'enzyme et non de façon aléatoire par des effets mécaniques. Les blocs de gel sont ensuite déposés sur le gel d'agarose et les fragments séparés par l'électrophorèse PFGE. Sous l'effet du champ électrique pulsé, les fragments, qui sont de grande taille parce que générés par les enzymes à sites rares de coupure, sont séparés.

Les endonucléases de restriction ApaI et NotI sont les plus souvent utilisées et bien adaptées pour révéler le polymorphisme des souches O. oeni. Les enzymes SfiI, et SmaI ont également été utilisées pour la différentiation intraspécifique de différentes espèces de Lactobacillus du vin.

Résultats :

Cette technique est la plus sûre pour l’identification au niveau de la souche. Elle est reproductible et, si besoin, l’utilisation d’une deuxième enzyme lève en général le doute après une première restriction. Elle peut être utilisée pour contrôler la pureté des cultures lors de la production de ferments. Elle est particulièrement adaptée à l'évaluation de la survie et du développement des ferments après inoculation pour la fermentation malolactique. Principal inconvénient de cette technique : elle prend du temps en raison de l'étape préliminaire de culture nécessaire avant la restriction et implique des équipements spécifiques et onéreux.

Références :

  1. Gindreau, E., Joyeux, A., De Revel, G., Claisse, O., Lonvaud-Funel, A. (1997). Evaluation de l´établissement des levains malolactiques au sein de la microflore bactérienne indigene. J. Int. Sci. Vigne Vin 31, 197-202.
  2. Pardo I., Rodas A.; Ferrer S. (1998). Study on populations dynamics of Oenococcus oeni in wine by using RFLP-PFGE. Les entretiens scientifiques Lallemand nº 6. pp. 93-96.
  3. Rodas, A.M., Ferrer, S., Pardo, I. (2005). Polyphasic study of wine Lactobacillus strains: taxonomic implications. Int. J. Sys. Evol. Microbiol., 55, 197-207.
  4. Zapparoli, G., Reguant, C., Bordons, A., Torrioni, S., Dellaglio, F. (2000). Genomic DNA fingerprinting of Oenococcus oeni strains by pulsed-field electrophoresis and randomly amplified polymorphic DNA-PCR. Current Microbiol., 40, 351-355.

METHODES « INDEPENDANTES » DE LA CULTURE :

1.      Introduction

Les méthodes indépendantes de la culture permettent de déterminer la diversité des populations bactériennes se développant lors de la vinification, sans avoir à isoler et mettre en culture. Elles permettent aussi de détecter les éventuelles cellules bactériennes viables mais non cultivables (VNC).

Ces techniques font intervenir :

  • La PCR : après l'extraction de l'ADN total à partir d'échantillons de jus de raisin ou de vin, l’amplification par la technique PCR (réaction en chaîne par polymérase)est réalisée avec des amorces universelles amplifiant l’ADN 16S, ou spécifiques de l'espèce ou de la souche.
  • L’hybridation in situ : utilisation de sondes spécifiques pour hybrider directement sur lame l’ADN des bactéries de l’échantillon. L’observation fait appel à la microscopie.

1.1.      Extraction d'ADN d'un échantillon de jus de raisin ou de vin

Des méthodes d'extraction et amplification d'ADN ont été mises au point pour travailler à partir d’échantillons de moûts et vins. Plusieurs protocoles d'extraction d'ADN ont été décrits (Baleiras-Couto et Eiras-Dias, 2005 ; Jara et al., 2008 ; Pinzani et al., 2004, Savazzini et Martinelli, 2006 ; Marques et al., 2010). En général, les différents kits disponibles dans le commerce sont utilisés conformément aux instructions du fabricant ou selon des protocoles modifiés.

Renouf et al., 2006 ont décrit le protocole suivant d'extraction d'ADN qui a été adapté aux échantillons de vin :

10 ml de vin sont centrifugés à 10 000 g à température ambiante pendant 10 mn. Le culot est lavé dans 1ml de solution tampon Tris 10mM EDTA 1mM (TE). Après une seconde centrifugation (10 000 g pendant 5 mn), le surnageant est jeté et le culot est remis en suspension dans 300 µl de 0.5 mM EDTA pH 8. Après ajout de 300 µl de billes de verre ( 0,1 mm), les échantillons sont mélangés à vitesse maximale pendant 10 mn. Puis, 300 µl de solution de lyse et 200 µl de solution de précipitation des protéines sont ajoutés et mixés pendant 20 s. La précipitation des fragments cellulaires s'effectue en maintenant le tube sur de la glace 5 mn. Après une autre centrifugation (10 000 g pendant 3 mn), le surnageant contenant l'ADN est transféré dans un nouveau tube de microcentrifugation et 60 µl d'une solution à 10% de PolyVinyl-Pyrrolidone (PVP) sont ajoutés. Une agitation au vortex à haute vitesse pendant 10 s permet de précipiter les polyphénols du vin qui inhibent la réaction d'amplification. Après centrifugation (10 000 g pendant 2 mn), le surnageant est transféré dans un tube de 1,5 ml de microcentrifugation contenant 300 µl d'isopropanol à température ambiante. On mélange doucement le contenu du tube en le retournant jusqu'à ce qu'une masse visible d'ADN puisse être observée. Après centrifugation (10 000 g pendant 15 mn), 300 µl d'éthanol à 70% à température ambiante sont ajoutés au culot avant la dernière étape de centrifugation (10 000 g pendant 2 mn). On aspire l'éthanol avec précaution, puis on sèche le tube. Au total, 50 µl d'eau pour préparation injectable (PPI) avec 1 µl de RNase sont utilisés pour réhydrater l'ADN toute une nuit à 4 ºC. Après réhydratation, les ADN sont stockés à -20°C.

Références :

  1. Baleiras-Couto M.M., Eiras-Dias J.E. (2006). Detection and identification of grape varieties in must and wine using nuclear and chloroplast microsatellite markers. Analytica Chimica Acta 563: 283–291.
  1. Jara C., Mateo E., Guillamón J.M., Torija M.J., Mas A. (2008). Analysis of several methods for the extraction of high quality DNA from acetic acid bacteria in wine and vinegar for characterization by PCR-based methods. Int. J. Food Microb., 128: 336–341.
  2. Marques A.P., Zé-Zé L., San-Romão M.V., Tenreiro,R. (2010). A novel method for identification of Oenococcus oeni and its specific detection in wine. Int. J. Food Microb., 142: 251-255.
  3. Pinzani P., Bonciani L., Pazzagli M., Orlando C., Guerrini S. and Granchi L. (2004). Rapid detection of Oenococcus oeni in wine by real-time quantitative PCR. Lett. Appl.Microb., 38: 118–124.
  4. Savazzini F., Martinelli L. (2006). DNA analysis in wines: Development of methods for enhanced extraction and real-time polymerase chain reaction quantification Analytica Chimica Acta, 563: 274–282

2.      Identification de l'espèce

2.1.      Réaction de polymérisation en chaine - Électrophorèse en gradient de gel dénaturant (PCR-DGGE) et séquençage

Champ d'application

Identification des bactéries lactiques du vin au niveau de l'espèce dans une population mixte

Principe

La technique PCR-DGGE est appliquée après extraction de l'ADN de l’échantillon. Elle consiste à amplifier les régions hypervariables des gènes codant l'ARNr 16S, ou d'autres gènes tels que le gène rpoB (codant la sous-unité  de l'ARN polymérase) qui sont encadrées par des régions consensus. Les amplifiats d'ADN, tous de taille identique mais de séquence différente s’il s’agit d’espèces différentes, sont séparés par électrophorèse sur un gel de polyacrylamide contenant un gradient d'agents dénaturants (généralement urée et formamide). Les fragments d'ADN double-brin migrent à travers le gel jusqu'à ce que les conditions chimiques provoquent leur dénaturation, entraînant un ralentissement de leur migration et finalement leur immobilisation. Cependant, les fragments ne sont pas totalement dénaturés en raison de la formation d'un « GC clamp » grâce à l'utilisation d'une amorce PCR présentant une extrémité 5 riche en GC. Le point auquel le fragment d'ADN double-brin est dénaturé dans le gel et devient de l'ADN simple-brin dépend de la séquence nucléotidique et de la teneur en GC (%) du fragment. Des séquences différentes ont des domaines de fusion différents et par conséquent également des points d'arrêt différents dans le gel. Les amplifiats d’ADN de bactéries d’espèces différentes sont séparés par leur distance de migration dans le gel. L'identification finale de chaque espèce est obtenue soit en repérant la distance de migration par rapport à un ADN de référence de l’espèce, soit par purification et séquençage de l’ADN de la bande extrait du gel et par comparaison avec les banques de données disponibles (Gen Bank, www.ncbi.nlm.nih.gov/gov/blast/)

Cette technique a été utilisée avec succès pour l'identification de plusieurs espèces de bactéries lactiques du vin dans un mélange complexe. On a tout d'abord utilisé les régions de l'ADNr 16S comme ADN cible (Lopez et al., 2003), mais il a été démontré plus récemment que le gène de ménage rpoB, codant la sous-unité béta de l'ARN polymérase, est une meilleure cible que le gène ARNr 16S pour la différentiation des espèces par analyse directe PCR-DGGE (Rantsiou et al. 2004 ; Renouf et al. 2006 ; Renouf et al. 2007, Spano et al. 2007).

Références :

  1. Lopez I., Ruiz-Larrea F., Cocolin L., Orr E., Phister T., Marshall M., VanderGheynst J., and Mills D.A. (2003). Design and Evaluation of PCR Primers for Analysis of Bacterial Populations in Wine by Denaturing Gradient Gel Electrophoresis. Appl. Environ.Microbiol. 6801–6807
  1. Rantsiou, K., Comi, G., Cocolin, L., 2004. The rpoB gene as a target for PCR-DGGE analysis to follow lactic acid bacteria population dynamics during food fermentations. Food Microbiol. 21, 481–487
  2. Renouf V., Claisse O., Miot-Sertier C.,.Lonvaud-Funel A (2006). Lactic acid bacteria evolution during winemaking:Use of rpoB gene as a target for PCR-DGGE analysis. Food Microbiol.23: 136–145
  3. Renouf V., Strehaiano P. and Lonvaud-Funel A. (2007). Yeast and bacteria analysis of grape, wine and cellar equipments by PCR-DGGE. J. Int. Sci. Vigne Vin, 41: 51-61.
  4. Spano G., Lonvaud-Funel A., Claisse O., Massa S. (2007). In Vivo PCR-DGGE Analysis of Lactobacillus plantarum and Oenococcus oeni Populations in Red Wine. Cur.Microbiol., 54: 9–13.

2.2.      Réaction de polymérisation en chaine (PCR) avec des amorces spécifiques aux espèces

Champ d'application

Recherche d’espèces de bactéries lactiques en mélange dans un échantillon de vin ou de moût.

Principe

Le principe général est que les amorces spécifiques à une espèce s'hybrident sur l’ADN matrice du mélange d’ADN extrait du vin ou du moût, si elles trouvent les séquences complémentaires. Leur hybridation provoque la réaction d’amplification. Seul l’ADN de l’espèce visée par le choix des amorces sera amplifié, si cette espèce est présente.

Procédure

La recherche d’Oenococcus oeni est possible parce que des amorces spécifiques à cette espèce ont été mises au point. Après extraction de l'ADN des échantillons de jus de raisin ou de vin, les réactions PCR sont réalisées conformément aux conditions décrites dans des protocoles spécifiques. Zapparoli et al., (1998) et Bartowsky et Henschke, (1999) ont mis au point des conditions de PCR permettant d'identifier O. oeni avec des amorces spécifiques au gène de l'enzyme malolactique, ou au gène ARNr 16S.

Références :

  1. Zapparoli G, Torriani S, Pesente P, Dellaglio F., 1998.Design and evaluation of malolactic enzyme gene targeted primers for rapid identification and detection of Oenococcus oeni in wine. Lett Appl Microbiol. 27:243-246.
  2. Bartowsky E.J., Henscke P.A. 1999 Use of a polymerase chain reactionfor specific detection of the malolactic fermentation bacterium Oenococcus oeni (formerly Leuconostoc oenos) in grape juice and wine samples. Austr. J. Grape Wine Res. 5: 39-44.
  3. 2.3 Détection de souches particulières de bactéries lactiques caractérisées par la présence d’un gène codant pour une fonction particulière ; recherche de bactéries d’altérations
  4. Le principe et le protocole sont les mêmes que pour la recherche d’une espèce. Mais les amorces sont des séquences déduites des gènes qui déterminent des fonctions d’altération : production d’amines biogènes (cf. OENO-MICRO 10-449), amertume causée par l’hydroxy-propionaldéhyde/acroléine (Claisse et Lonvaud-Funel, 2001) et maladie de la graisse (Gindreau et al., 2001).
  5. Claisse, O., and A. Lonvaud-Funel. 2001. Primers and a specific DNA probe for detecting lactic acid bacteria producing 3-hydroxypropionaldehyde from glycerol in spoiled ciders. J Food Prot 64:833-7.
  6. Gindreau, E., E. Walling, and A. Lonvaud-Funel. 2001. Direct polymerase chain reaction detection of ropy Pediococcus damnosus strains in wine. J Appl Microbiol 90:535-42.

3.      Identification d'une espèce bactérienne dans une population mixte sans extraction d'ADN

3.1.      Hybridation in situ : Technique d'hybridation in situ par fluorescence (FISH)

Cette technique repose sur la conception de sondes spécifiques à une espèce, marquées à l'aide d'un marqueur fluorescent. L'ARN ribosomique est souvent la cible de ces sondes. La première étape consiste à perméabiliser les cellules bactériennes, ce qui permet à la sonde de pénétrer la paroi bactérienne et d'atteindre l’ARN. La sonde s’hybride si elle trouve la séquence complémentaire dans l’ARN 16S du ribosome. Par conséquent, lors de cette étape le fluorochrome se fixera sur le ribosome de cellules dont l'espèce correspond à la sonde. L’observation se fait avec un microscope à épifluorescence. Il est possible de détecter, dénombrer et identifier simultanément différents types de micro-organismes dans un échantillon, si l’on utilise plusieurs sondes avec des fluorochromes de couleur différente. L'un des principaux avantages de cette méthode réside dans le fait qu'elle est très rapide, parce qu'elle ne nécessite pas de culture de l'échantillon. Son principal inconvénient est sa faible sensibilité limité par l'observation microscopique.

Cette méthode peut être adaptée à la détection de souches spécifiques en sélectionnant une sonde ADN qui s'hybride avec un gène ou toute autre région du génome.

Références :

  1. Sohier, D. Lonvaud- Funel, A. (1998). Rapid and sensitive in situ hybridization method for detecting and identifying lactic acid bacteria in wine. Food Microbiol. 15, 391-397.
  1. Blasco L., Ferrer S.; Pardo I. (2003). Development of specific fluorescent oligonucleotide probes for in situ identification of lactic acid bacteria. FEMS Microbiol. Lett. 225, 115-123.