Code de bonnes pratiques de collage des vins à appliquer pour l'utilisation d'agents de collage d'origine protéique à potentiel allergique (caséine et blanc d'oeuf)
RÉSOLUTION OIV-OENO-SECSAN 520-2014
CODE DE BONNES PRATIQUES DE COLLAGE DES VINS A APPLIQUER POUR L’UTILISATION D’AGENTS DE COLLAGE D’ORIGINE PROTEIQUE A POTENTIEL ALLERGENIQUE (CASEINE ET BLANC D’ŒUF)
L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE,
VU l'article 2 paragraphe 2 b ii de l'Accord du 3 avril 2001 portant création de l'Organisation internationale de la vigne et du vin,
CONSIDÉRANT que les réglementations de certains pays imposent de mentionner les allergènes utilisés lors de l'élaboration, lorsque leur présence peut être détectée dans le produit alimentaire fini. Au sujet de la mise en application de cette réglementation d’étiquetage pour les vins :
CONSIDÉRANT que les allergènes alimentaires doivent être déclarés sur l’étiquette lorsque la(les) protéine(s) allergénique(s) issue(s) d’aliments est (sont) présente(s) et détectable(s) dans le produit vinicole fini,
AYANT PRIS CONNAISSANCE des travaux du Groupe d’experts « Sécurité alimentaire » et de l’avis du Groupe d’experts « Technologie »,
CONSIDÉRANT la proposition faite par la Commission II « Œnologie » et la Commission IV « Sécurité et santé »,
DÉCIDE d’adopter le Code de bonnes pratiques de collage suivant, et
RECOMMANDE que ce Code soit régulièrement mis à jour en prenant en compte l’évolution des données disponibles.
Code de bonnes pratiques de collage des vins à appliquer pour l’utilisation d’agents de collage d’origine protéique à potentiel allergénique (caséine et blanc d’œuf)
Directives de bonnes pratiques de collage des vins
Le collage implique l’ajout dans le moût ou le vin d’une substance absorbante/adsorbante ou réactive afin de réduire ou d'éliminer la présence de certains composants moins désirables. Les agents de collage sont ajoutés pour modifier la limpidité, la clarté, la couleur, la texture ou la flaveur du vin, et surtout afin de s’assurer qu’un vin se maintienne dans un état stable spécifique pour la plus longue durée possible. Le processus de collage est conçu pour que les agents de collage ne persistent pas dans les moûts ou les vins qui ont dû être collés.
L’efficacité d’un agent de collage donné dépend de l’agent lui-même, des doses d’ajout, de sa méthode de préparation et d’ajout, ainsi que des caractéristiques du vin, telles que la valeur du pH, la présence de substances capables d’interagir avec les protéines (tannins), la teneur en métaux, la température, la présence de CO2 et les traitements préalables subis par le vin (voir annexe 1 pour de plus amples détails sur les aspects techniques des agents de collage).
En marge des étapes indiquées ci-après en matière de bonnes pratiques de collage, les vinificateurs devraient s'assurer de maintenir une traçabilité tout au long du processus de vinification et de conservation, en prenant note du lot à partir duquel chaque échantillon de substance de collage est issu ainsi que d’obtenir de leurs fournisseurs d’agents de collage des preuves documentées attestant la conformité au Codex œnologique international.
Étapes
- Les agents de collage doivent être exempts de contaminants indésirables et être conformes aux réglementations applicables. Ils doivent être stockés en emballages hermétiques dans un endroit frais et sec, ou dans les conditions de stockage conseillées par les fabricants.
- Il est recommandé que des essais soient conduits en laboratoire avant le traitement du vin à la cave.
- Les essais en laboratoire sont menés de manière à reproduire, dans la mesure du possible, les conditions du traitement à réaliser à la cave ; une attention particulière doit être portée au lot d’agent de collage à utiliser, à sa méthode de préparation et d’ajout au vin, ainsi qu’à la température de l’échantillon utilisé en laboratoire par rapport aux grands volumes de vin normalement collés en cave. Les protocoles de préparation (hydratation, concentration …) des protéines de collage réalisés au laboratoire et la cave devraient être similaires voire identiques.
- Il convient de limiter au maximum le volume d’eau distillée, déionisée, ou potable utilisé pour la dissolution ou la dispersion de l'agent de collage, de manière à éviter une dilution excessive du vin (les règlementations applicables doivent être respectées).
- La quantité d’agent de collage utilisée correspond à la quantité minimale requise pour obtenir le résultat escompté conformément aux stipulations de l'évaluation sensorielle et/ou analytique du vinificateur ; en aucun cas cette quantité ne pourra dépasser les normes et règlements en vigueur applicables.
- Un mélange rigoureux et approprié de l’agent de collage dans le moût ou le vin doit être assuré, et un temps de contact suffisant doit être respecté afin que la substance réagisse avant soutirage et/ou filtration ultérieurs.
- Les meilleures pratiques de filtration reconnues au niveau industriel (y compris une filtration fine à l’aide de poudre de diatomées et de fibres de celluloses et/ou la filtration préalable à la mise en bouteille au travers d’un filtre à membrane de 0,65 µm ou moins, ou la réalisation de traitements à effets similaires) doivent être employées afin d'éliminer les protéines de collage insolubles. Si le vin traité est simplement soutiré des lies résultant du traitement de collage et mis en bouteille sans filtration, ou si des techniques de filtration ou autres moins rigoureuses sont employées pour l’élimination des lies, une analyse doit toujours être réalisée avant la mise en bouteille. Cependant, même en cas de filtration, il est recommandé d’analyser les vins filtrés ou non filtrés afin de confirmer qu’aucun résidu d’agent(s) de collage à potentiel allergénique ne peut être détecté.
- Une surveillance de routine du processus de collage doit être menée après sa réalisation et l’élimination des résidus. Cela implique en général une analyse d’un échantillon de vin collé, au moyen d’une méthode d’analyse suffisamment sensible, pour l’agent de collage en question. L’échantillonnage doit être approprié afin de permettre de s'assurer que les processus de collage sont conduits de manière à ce qu'aucun résidu d’allergène détectable ne soit laissé dans le vin traité.
Une action corrective appropriée (exemple : filtration adaptée…) doit être entreprise lorsque l’analyse de tels vins indique la présence d’agents de collage résiduels ; en l’absence d’action corrective appropriée, la présence des allergènes doit être indiquée sur l’étiquetage.
- Un contrôle devrait être mené à intervalles réguliers, sous forme d’une évaluation des moyens de maîtrise des processus de collage, à une fréquence appropriée afin de s'assurer que ceux-ci sont conduits de manière à ne pas laisser des résidus d'agent de collage détectables. Ce contrôle devrait également garantir que des actions correctives appropriées et opportunes sont entreprises lorsque les indices obtenus signalent la possibilité de présence d'agents de collage résiduels dans le vin traité (par ex. par l'intermédiaire de résultats faux positif).
Tandis que les réglementations ne fournissent pas de niveau seuil spécifique, les méthodes analytiques habituelles pour les allergènes alimentaires peuvent détecter des résidus dans les plages les plus basses de parties par millions (ppm). Si ces méthodes ne détectent aucune protéine allergénique dans le vin, il peut alors être considéré qu’aucun résidu au dessus de la limite de détection n’est présent.
ANNEXE 1 : AGENTS DE COLLAGE – ASPECTS TECHNIQUES
L'ajout d'un agent de collage dans le vin peut répondre à un triple objectif : « adoucir » ou réduire l’astringence et/ou l’amertume ; clarifier et éliminer les protéines susceptibles de produire une turbidité ; et/ou stabiliser et réduire la couleur au travers de l’adsorption et la précipitation des composés phénoliques polymérisés et des tanins. L’agent de collage réagit avec les composés, de manière physique ou chimique, pour former un nouveau complexe pouvant être séparé du vin.
Les agents de collage peuvent se lier aux substances au travers de :
- interaction électrique − l’agent de collage et la/les substances(s) à éliminer possèdent des charges opposées et s’assemblent pour former des particules plus grosses qui se décantent dans le vin
- formation d’une liaison − une liaison chimique se forme entre la/les substances(s) à éliminer et l’agent de collage,
- absorption et adsorption − la/les substances(s) à éliminer est/sont soit capturée(s) dans la structure de l’agent de collage, soit rattachée(s) à la surface de l’agent de collage.
Essai par échantillonnage
Le collage ne doit être réalisé qu’en cas de nécessité, et en utilisant des niveaux d’ajout d'agent de collage les plus bas possibles, des ajouts excessifs étant susceptibles d'éliminer du vin des caractéristiques aromatiques et gustatives recherchées. Il est cependant important d’ajouter l’agent de collage en quantité suffisante lorsque l’objectif principal est d’obtenir la stabilité et/ou d'éliminer des caractéristiques sensorielles indésirables.
Les différents agents de collage réagissent de manière distincte avec les différents vins[1] , voire avec le même vin. Ainsi, il est fortement recommandé de conduire un essai par échantillonnage, impliquant l’ajout de différentes quantités d’agent de collage à des petits échantillons de vin, afin de déterminer les résultats obtenus à partir d’une substance de collage spécifique utilisée dans le processus ainsi que la dose optimum permettant d’éviter un collage insuffisant ou excessif. Les échantillons d’essais sont évalués quant à leurs qualités organoleptiques, et le traitement est augmenté proportionnellement au volume total du lot de vin en cours d'élaboration.
Ajout d’agents de collage au vin blanc et au vin rouge
Type de vin |
Agent de collage |
Ajout type (mg/L) |
Caractéristiques |
Limite de détection pour la caséine et l’ovalbumine (méthodes d’analyse établies par l’OIV)[2] |
Vin blanc |
Lait[3], caséine, caséine mélangée à du carbonate de potassium ou caséinate d’hydrogénocarbonate de potassium. |
50-500[4] |
Bonne clarification. Traite et prévient l’oxydation. Pas de surcollage. Principalement utilisé avant la fermentation alcoolique. |
0,25 mg/L |
Vin rouge |
Produits dérivés de l’œuf. |
30-150[5] |
Très bon agent de collage pour les vins tanniques d’un certain âge. Tend à ne pas éliminer les colloïdes protecteurs. |
0,25 mg/L |
Lait, caséine, caséine mélangée à du carbonate de potassium ou caséinate d’hydrogénocarbonate de potassium. |
50-250[6] |
Bonne clarification. Traite et prévient l’oxydation. Pas de surcollage. |
0,25 mg/L |
Lait, caséine, et caséinates de sodium et de potassium
Les moûts et les vins étant différents quant à leur composition et leur niveau d’oxydation, il n’existe pas de recommandation établie de quantité de caséine à utiliser pour le collage. Du point de vue du vinificateur, il est important que la quantité de protéines résiduelles soit nulle ou faible après le collage/la clarification. La présence de quantités relativement importantes d’agents de collage résiduels entrainerait la formation de précipités protéiques visibles nécessitant des actions correctives supplémentaires. Un collage excessif à la caséine pourrait communiquer aux vins des arômes de produits lactés.
La caséine se mélange difficilement dans le moût/le vin car elle est insoluble dans les solutions acides ; elle doit donc être mélangée dans de l’eau présentant un pH supérieur à 8 ou rendue alcaline avant le mélange avant son incorporation au moût ou au vin. Le caséinate de potassium, ou une combinaison de caséine acide et de carbonate de potassium ou d’hydrogénocarbonate, sont généralement utilisés de préférence à la caséine elle-même car ils s’avèrent directement solubles dans l’eau. La concentration de la caséine dans l’eau ne doit pas dépasser 10 % afin d’obtenir une faible viscosité et donc une bonne homogénéisation dans le vin ou le moût. Les solutions de caséine doivent être introduites très progressivement dans le vin ou le moût en circulation au moyen d’un système Venturi équipé d’une pompe. Le pompage doit ensuite être maintenu jusqu’à ce que l'intégralité de la caséine soit liée aux substances devant être éliminées du vin ou du moût, avant de coaguler et de précipiter rapidement dans le milieu acide du vin. Il est important que le mélange soit réalisé de manière énergique et homogène afin d’obtenir la meilleure répartition possible de la caséine et d’éviter la formation de grumeaux à la surface du moût ou du vin. Une fois que l’agent de collage s’est décanté (très rapidement : 2 jours), le vin est filtré. La caséine est le plus souvent utilisée dans les moûts. Dans ce cas, le moût doit être séparé de ses lies avant la fermentation alcoolique.
Produits dérivés de l’œuf
Le blanc d’œuf est utilisé en tant qu’agent de collage (si nécessaire) lorsque le vin est en fût ou plusieurs jours avant la mise en bouteille. Le blanc d’œuf sous forme liquide doit être dilué au 1/3 dans un volume d’eau, le blanc d’œuf poudre doit être dissous dans 10 fois son poids d’eau. Les solutions préparées seront incorporées au vin en mouvement, par exemple au moyen d’un système Venturi. Les particules formées se décantent au cours des jours suivant le traitement (5 à 7 jours) et doivent être séparées du vin par filtration. Le collage au blanc d’œuf a la particularité de donner des particules légères qui restent accrochées aux parois des fûts. Il est impératif de procéder à un nettoyage complet des fûts rapidement après le soutirage et la filtration des vins collés au blanc d’œuf.
[1] Chaque vin est différent quant à sa composition et réagira différemment au même agent de collage. L’efficacité d’un agent de collage dépendra de l’agent utilisé, des préparations, de la méthode d’ajout au vin, du dosage, du pH du vin et de sa teneur en métaux, de la température, du niveau de CO2 dissous, ainsi que des traitements antérieurs subis par le vin.
[2] Résolution OIV-OENO 427-2010 rev 2012
[3] En cas d'utilisation de lait, le dosage des allergènes est recommandé aussi bien pour la caséine que pour la -lactoglobuline
[4] Résultats de nouvelles études destinées à évaluer l’allergénicité potentielle des vins élaborés en utilisant des auxiliaires technologiques protéiques (OIV 2010).
[5] Résultats de nouvelles études destinées à évaluer l’allergénicité potentielle des vins élaborés en utilisant des auxiliaires technologiques protéiques (OIV 2010).
[6] Résultats de nouvelles études destinées à évaluer l’allergénicité potentielle des vins élaborés en utilisant des auxiliaires technologiques protéiques (OIV 2010).